Compagnons au féminin, Berty Albrecht et les autres : épisode • 3/4 du podcast Ami, entends-tu, les compagnons de la Libération

Membres du maquis de la Trésorerie (près de Boulogne-sur-Mer), le 14 septembre 1944. - Wikicommons
Membres du maquis de la Trésorerie (près de Boulogne-sur-Mer), le 14 septembre 1944. - Wikicommons
Membres du maquis de la Trésorerie (près de Boulogne-sur-Mer), le 14 septembre 1944. - Wikicommons
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Longtemps occulté, le rôle des femmes dans la Libération fut pourtant décisif. Une partie de la résistance française s’organise autour de figures féminines, telle Berty Albrecht. Existe-t-il des spécificités dans ces organisations mixtes ? Comment expliquer cette reconnaissance tardive ?

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La croix de la Libération est destinée "à récompenser les personnes ou les collectivités militaires et civiles qui se seront signalées dans l'œuvre de libération de la France et de son Empire". Nous y trouvons dix-huit unités militaires, terre, air, mer ; cinq communes, qu’il est aisé de citer, Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors et l’île de Sein.

Quant aux 1 038 personnes honorées, il serait trop long de donner tous les noms, sinon ceux des six femmes – seulement six –, honneur de la France : Berty Albrecht, fondatrice du mouvement Combat, qui se suicide à la prison de Fresnes en 1943 ; Laure Diebold, agent de liaison du réseau Mithridate, secrétaire de Jean Moulin, déportée ; Marie Hackin, archéologue, chargée de mission avec son mari, disparue en mer en février 1941quand leur navire est torpillé ; Marcelle Henry, membre du réseau d'évasion VIC, dirigé par Henri Levin, morte peu après son retour de déportation ; Simone Michel-Lévy, résistance des P.T.T., morte en déportation ; Émilienne Moreau-Evrard, héroïne de la Grande Guerre, agent du réseau Brutus, décédée en 1971. Il faut rappeler leur nom et leurs actions pour honorer ces compagnons – ces compagnes – de la Libération et à travers elles toutes les femmes qui ont résisté.

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Sur les 1038 compagnons de la Libération, seuls six sont des femmes. Pourtant, les noms d’héroïnes de la Résistance ne manquent pas : Lucie Aubrac, Germaine Tillion, Annette Beaumanoir, Geneviève de Gaulle…. Si ces femmes n’ont pas reçu la croix de la Libération, elles n’en ont pas moins été commémorées, honorées, parfois panthéonisées. Au-delà de ces grands noms, la reconnaissance des  femmes de la Résistance a été plus tardive que celle de leurs homologues masculins.

Une vie, une oeuvre
58 min

Les raisons qui ont poussé ces femmes à s’engager dans la Résistance ont été similaires à celles des hommes : patriotisme, haine de l’occupant, refus de la capitulation, fidélité aux grands principes de 1789…. Les femmes ont souvent rejoint la Résistance accompagnées d’un mari, d’un frère, d’un amoureux, d’un oncle.... Ces relations ont effacé l’engagement et l'action de ces femmes, à l’instar de Berty Albrecht dont le rôle a souvent été réduit à celui de secrétaire d’Henri Frenay. Un oubli qui peut aussi s’expliquer par le type de missions qui leur ont été confiées. Les femmes résistantes continuent d’être considérées comme des mères et des épouses naturellement douées pour un certain type de travaux : des missions de sténo-dactylo, d’agents de liaison ou d’assistantes sociales. L’action directe, militaire et plus héroïque, reste masculine. La création en 1940 des volontaires féminines de la France Libre infléchit cette conception des choses : les femmes peuvent désormais être des militaires.

Comment retracer ces parcours, souvent anonymes et clandestins, de résistantes ? Comment expliquer le peu de reconnaissance officielle qui a longtemps été accordé à ces femmes ? Dans les faits, la Résistance au féminin a-t-elle vraiment comporté des spécificités ?

Pour répondre à ces questions, nous recevons Christine Levisse-Touzé, historienne et ancienne directrice du Musée du général Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris-Musée Jean Moulin (1991-2017). Elle a notamment publié les actes issus du colloque de 2001 Les Femmes dans la Résistance en France (Tallandier, 2003). Plus récemment, elle a co-écrit, avec Dominique Veillon, Jean Moulin artiste préfet résistant (Tallandier, 2013) et dirigé l’ouvrage collectif Libérer Paris août 1944 (Ouest-France, 2014).

Et Dominique Missika, éditrice, journaliste et spécialiste de l’histoire de la Résistance. Elle est l’autrice de la biographie Berty Albrecht (Perrin 2005), rééditée en collection Tempus en 2014. Plus récemment, elle a écrit Les inséparables. Simone Veil et ses sœurs (Seuil, 2018), Un amour de Kessel (Seuil, 2020).

La multi-appartenance est le dénominateur commun de ces femmes résistantes. Pourtant, au-delà de l’inégalité de traitement hommes-femmes, on note également une notoriété inégale parmi les six femmes compagnons de la Libération – notamment la place prépondérante occupée par Berty Albrecht dans la mémoire collective. (Christine Levisse-Touzé)

Avant même la résistance à l’occupation allemande (dès juin 1940), Berty Albrecht était une femme éprise de liberté, d’égalité et de justice sociale : habitée par une force intérieure. (Dominique Missika)

Avec Henri Frenay, son compagnon, elle va permettre la diffusion d’un journal clandestin « Petites Ailes », qui va donner naissance au mouvement Combat (printemps 1942). En parallèle du recrutement de résistants, elle créée également un service social pour les familles de prisonniers. (Dominique Missika)

Sons diffusés :

Archive - Mireille Albrecht parle de sa mère - Femmes résistantes ou le temps du courage - Femmes dans la guerre -18/08/1989

Archive - Henri Frenay rend hommage à Berty Albrecht - British Broadcasting Corporation (BBC) - 1943

Archive - Les noms des martyrs de la Résistance sont donnés aux rues de Paris - Journal France Libre Actualités - 27/10/1944

Extrait - L'Armée des ombres de Jean-Pierre Melville (1969)

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